DARIUS DOLATYARI DOLATDOUST, Fantasme aux souvenirs rêvés

DARIUS DOLATYARI DOLATDOUST, Fantasme aux souvenirs rêvés

Darius Dolatyari Dolatdoust est un artiste, performeur, chorégraphe et designer né en France et d’origine iranienne. Aussi loin qu’il s’en souvienne, il garde en mémoire les récits de son père sur son Iran natale, ou plutôt ce que son père laissait dans le silence. Comme il le dit lui même, c’est le « récit classique d’un émigré exilé qui efface la mémoire de son passé ».

Février 2025
Photo © Simon Verjus

« Ô vent, si tu passes par le jardin de ma patrie, apporte-moi une bouffée de son parfum. » Hafez de Shiraz (poète iranien du XIVe siècle)

Aussi loin qu’il s’en souvienne, Darius garde en mémoire les récits de son père sur son Iran natale, ou plutôt ce que son père laissait dans le silence. Comme il le dit lui même, c’est le « récit classique d’un émigré exilé qui efface la mémoire de son passé ». 

Né des yeux de son père, le fantasme d’une Iran rêvée a fait croitre en Darius un désir de découvrir la patrie à laquelle il se sent appartenir. Cependant, impossible pour lui d’y aller où il y risque le service militaire et la peine de mort de par son homosexualité. 

Photo © Hubert Crabières

Coincé en France, à 6000 km de l’objet de son désir, il découvre seul l’Iran dans les couloirs du département persan du Musée du Louvre : « Pour moi, c’était le seul lien que j’avais avec la culture iranienne ».  

Wearing The Dead (2020) Photo © Darius Dolaytari Dolstdoust

De cette rencontre naîtra la performance Wearing the dead (2020) où l’artiste aux côté d’autres performeur.ses portent des costumes inspirés par les sculptures persanes du Louvre abordant ainsi la question de son héritage, de sa recherche personnelle que Darius résume en ces mots :

« Le costume est un voyage, un pont entre une culture dont j’ai hérité et dont je fantasme ».

Wearing the dead (2020) Photo © SImon Verjus

S’en suit également la production d’une série de feutres dans l’installation Daddy’s Temple (2024) où l’artiste construit des scènes à partir d’images d’archives de son père et de sa famille que Darius ne connait pas. Les pièces sont alors des collages hybrides inspirés des photos d’archives son père et ses recherches autour des architectures des villes iraniennes qu’a connues son père comme Rasht et Téhéran. Pour Darius, il s’agissait de « recomposer des faux souvenirs ou les siens [ceux de son père] ».

Daddy's temple (2024) Photo © Darius Dolatyari Dolatdoust

Des costumes aux feutres, on découvre l’intérêt de l’artiste pour le corps, les tissus et la mode qu’il cultive depuis l’Ecole Duperré où il y apprend la couture et le vêtement. Très vite, l’atmosphère qui règne dans l’univers de la mode le dégoute, à la fois pour des raisons étiques vis à vis des corps objectifiés et à la fois d’un point de vue écologique. Il commence ainsi à réorienter sa pratique vers la sculpture textile, pour ensuite se diriger vers la performance et la chorégraphie.

Dressing (2022) Photo © Romy Berger

Le référentiel humain n’est pas entièrement rejeté par l’artiste qui développe un autre fantasme en parallèle du premier, celui du corps masculin. En position de fragilité, ces corps s’affrontent dans une ambiguïté entre lutte et coït, entretenue par l’évanescence de la technique du feutre. 

Photo © Darius Dolatyari Dolatdoust

Au-delà de la dimension matérielle, la danse insuffle une âme aux costumes et à l’expression scénique. Darius chorégraphie ses performances pour révéler le pouvoir incarné du costume. Pour lui, « ce n’est pas l’exactitude du mouvement qui m’intéresse mais comment un mouvement peut-être interprété, vu dans le temps et l’espace, ainsi que ses résonances. » 

Flags Parade (2022) Photo © Paul Rousteau

Darius Dolatyari Dolatdoust, artiste polyvalent, multiplie les supports et les formats questionnant à la fois la plasticité de l’oeuvre et celle du récit. Sa pratique en premier abord introspective peint l’universalité de l’humanité: la quête de nos identités, la fragilité d’un souvenir, la porosité des espèces.  

Crédits:
Photo couverture (Home) : Darius Dolatyari Dolatdoust
Texte : Raphaël Levy

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